BEH (2019) SUICIDE ET TENTATIVES DE SUICIDE: DONNÉES ÉPIDÉMIOLOGIQUES RÉCENTES

BEH (2019) SUICIDE ET TENTATIVES DE SUICIDE: DONNÉES ÉPIDÉMIOLOGIQUES RÉCENTES

Coordination scientifique // Scientific coordination

Christine Chan-Chee et Enguerrand du RoscoätSanté publique France, Saint-Maurice, France

Si le lien est brisé: http://prevention.suicide.free.fr/wp-content/uploads/BEH_2019_3-4.pdf

 

Prévention du suicide : l’évaluation est indispensable

// Suicide prevention: Evaluation is essential

Pierre Thomas
Professeur de psychiatrie, Faculté de médecine, Université de Lille, France

Les hospitalisations pour tentative de suicide dans les établissements de soins de courte durée : évolution entre 2008 et 2017

// Hospitalizations for attempted suicide in acute care facilities in France: Trends between 2008 and 2017

Christine Chan-Chee
Santé publique France, Saint-Maurice, France

Étude de faisabilité de la mise en place d’un système de surveillance des suicides basé sur les données des instituts médico-légaux

// Feasibility study of the implementation of suicide surveillance system based on data from forensic institutes

Virginie Gigonzac et coll.
Santé publique France, Saint-Maurice, France

Tentatives de suicide, pensées suicidaires et usages de substances psychoactives chez les adolescents français de 17 ans. Premiers résultats de l’enquête Escapad 2017 et évolutions depuis 2011

// Suicide attempts, suicidal thoughts and use of psychoactive substances among 17-year-old French adolescents. First results of the ESCAPAD 2017 survey and changes since 2011

Eric Janssen et coll.
Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT), La Plaine Saint-Denis, France

 

Baromètre de Santé publique France 2017 : tentatives de suicide et pensées suicidaires chez les 18-75 ans

// Santé Publique France Health Barometer 2017: Suicidal attempts and suicidal ideation among the 18-75 years-old

Christophe Léon et coll.
Santé publique France, Saint-Maurice, France

Causes associées aux suicides dans les certificats de décès. Analyse des certificats médicaux de décès, France, 2000-2014

// Causes associated with suicide in death certificates. Analysis of death certificates in France, 2000-2014

Catherine Ha et coll.
Santé publique France, Saint-Maurice, France

Pensées suicidaires dans la population active occupée en France en 2017

// Suicidal ideation among the working population in France in 2017

Pauline Delézire et coll.
Santé publique France, Saint-Maurice, France

Activité des associations de prévention et d’aide à distance en santé dans le domaine de la prévention du suicide

// Activity of prevention and remote support services associations in the field of suicide prevention in France

Christine Chan-Chee et coll.
Santé publique France, Saint-Maurice, France

Union nationale de Prevention du suicide

L’UNPS fait un gros travail de compilation d’informations et dedonnées sur leur site: https://www.unps.fr/

Elle rassemble ici quelques infographies utiles pour delivrere des formations.

Taux de décès par suicide en population générale

Tous les chiffres en France : Bulletin Épidémiologique Hebdomadaire 2020

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), plus de 800 000 décès sont attribuables chaque année à un suicide dans le monde 1. En France métropolitaine, les dernières données disponibles du Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc- Inserm) font état de 8 948 décès par suicide en 2015. Même si leur nombre est en diminution ces dernières années, la France présente, parmi les pays européens, un des taux de suicide les plus élevés, derrière les pays de l’Est, la Finlande et la Belgique.

Variation du taux de décès par suicide en France entre 2000 et 2016

Globalement, le taux de décès par suicide a tendance à diminuer : -33,5 % entre 2000 et 2016. Cette baisse est plus importante au cours de la période 2008-2016 (-23,5 %) qu’entre 2000 et 2008 (-13,0 %). Les taux diminuent pour toutes les classes d’âge à l’exception des 45-54 ans entre 2000 et 2008 et des 95 ans ou plus au cours de la période 2008-2016.

Prévalences

En 2017, 4,7 % des personnes âgées de 18 à 75 ans ont déclaré avoir eu des pensées suicidaires au cours des 12 derniers mois, les femmes (5,4 %) étant en proportion plus nombreuses que les hommes (4,0 % ; p < 0,001). Compte tenu des intervalles de confiance liés à l’échantillonnage de l’enquête, cette différence selon le sexe n’est significative que chez les 55-64 ans avec 6,3 % de pensées suicidaires au cours des 12 derniers mois chez les femmes contre 3,6 % chez les hommes (p < 0,01). La pré­valence varie également selon la classe d’âge, avec un pic noté chez les 45-54 ans (5,6 %), aussi bien chez les femmes que chez les hommes (respectivement 6,3 % et 4,9 %).

Les tentatives de suicides

En 20177,2% [6,8-7,6] (n=1 742) des 18-75 ans déclaraient avoir tenté de se suicider au cours de leur vie (9,9% des femmes vs 4,4% des hommes ; p<0,001) et 0,39% [0,30-0,51] (n=75) au cours des 12 derniers mois (0,29% des hommes vs 0,48% des femmes ; p=0,076). Parmi les personnes ayant fait une TS au cours de leur vie, plus d’un tiers (37,7%) ont déclaré en avoir fait au moins deux (39,9% des femmes vs 32,4% des hommes ; p<0,05). L’âge moyen de la dernière TS était de 29 ans pour les hommes et 27 ans pour les femmes (p<0,05) ; l’âge médian était de 25 ans (27 ans pour les hommes et 24 ans pour les femmes). La majorité des TS ont eu lieu avant l’âge de 25 ans, et c’est entre 15 et 19 ans que la proportion de suicidants était la plus importante, avec 30,1% de femmes concernées et 19,5% d’hommes (p<0,001).

Évolution du nombre de séjours hospitaliers pour tentative de suicide et de patients en France entre 2008 et 2017

Les évolutions annuelles du nombre de séjours hospitaliers pour tentative de sui­cide et du nombre de patients entre 2008 et 2017 sont parallèles. Le nombre d’hospitalisations augmente entre 2008 et 2010 puis baisse jusqu’en 2013 pour se stabiliser ensuite. Dans les années 2008-2011, le nombre annuel de séjours pour tentative de suicide est supérieur à 100 000 et le nombre de patients hospitalisés se situe autour de 89 000. En 2017, on compte moins de 90 000 séjours effectués par un peu plus de 77 000 personnes.

Taux de décès par suicide selon les régions

Les taux de décès par suicide par région doivent être comparés avec prudence. En effet, les données relatives au nombre de décès par suicide présentent un défaut d’exhaustivité global estimé à 10 % en France métropolitaine par le CépiDc-Inserm. Cette sous-estimation varie selon les régions et atteint 46 % en Île-de-France. Ainsi les différences de taux de suicide sont vraisemblablement en partie imputables à la qualité de la remontée de l’information et ne reflètent pas la situation épidémiologique réelle (voir le 2e rapport de l’ONS, p. 185).

Les taux standardisés moyens de décès par suicide entre 2014 et 2016 varient forte­ment selon les régions. Le taux de la Bretagne dépasse de 52,0 % le taux moyen de la France métropolitaine. Viennent ensuite les régions Pays de la Loire, Normandie et Hauts-de-France, avec des taux supérieurs de plus de 30 % au taux moyen de France métropolitaine. Les régions Auvergne-Rhône-Alpes, Corse, et Île-de-France enregistrent les plus bas taux de décès par suicide (inférieurs de plus de 14 % au taux moyen de France métropolitaine).

Entre 2000-2002 (période de référence) et 2014-2016, les taux de décès par suicide ont tendance à diminuer de façon significative quelle que soit la région considérée.

Modes de suicide

En 2016, comme les années précédentes, le mode de suicide le plus fréquent est la pendaison (58 % des suicides), loin devant les armes à feu (13 %), les prises de médicaments et autres substances (10 %) et les sauts d’un lieu élevé (8 %). Ces modes de décès diffèrent sensiblement selon le sexe. Pour les hommes, la pendai­son est à l’origine de 62 % des suicides et les armes de 16 %. Pour les femmes, la pendaison (44 %) et la prise de médicaments et autres substances (21 %) sont les modes les plus utilisés.

Causes associées aux suicides dans les certificats de décès

Sur la période d’étude, 156 910 décès par suicide chez les individus âgés d’au moins 10 ans ont été enregistrés en France, dont 74% d’hommes. Ces décès représentent 1,9% du total des décès et 10 461 cas en moyenne par an. Selon ces certificats de décès, 40% des suicides étaient associés à la présence de troubles mentaux, plus souvent chez les femmes que chez les hommes (48% vs 36%). Il s’agissait en grande majorité de troubles dépressifs (38% chez les femmes et 28% chez les hommes). Ceux-ci étaient 41 fois plus fréquemment associés aux suicides qu’aux autres décès. Les suicides des personnes âgées de moins de 25 ans représentaient une part modérée du total des suicides (5,5%), mais étaient à l’origine d’un nombre élevé d’années de vie perdues. Des associations particulièrement fortes ont été observées avec les troubles de l’humeur et les troubles anxieux dans cette classe d’âge.

Pour 16% des suicides, le certificat de décès indiquait l’existence d’au moins une pathologie non mentale ayant contribué au décès : les maladies les plus souvent associées étaient celles de l’appareil circulatoire (5% des CD suicide), les maladies du système nerveux (4%) et les tumeurs invasives (3%), sans que l’étude ait été en mesure d’identifier des pathologies non mentales liées aux suicides.

OMS et prevention du suicide

Principaux faits

  • Plus de 700 000 personnes se suicident chaque année.
  • Pour chaque suicide, on dénombre de nombreuses autres tentatives de suicide. Une tentative de suicide est le principal facteur de risque de suicide ultérieur dans la population générale.
  • Le suicide est la quatrième cause de mortalité chez les 15-29 ans.
  • 77 % des suicides surviennent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire.
  • L’ingestion de pesticides, la pendaison et les armes à feu sont parmi les méthodes de suicide les plus répandues dans le monde.

Chaque année, près de 703 000 personnes se suicident et beaucoup d’autres font une tentative de suicide. Chaque suicide est une tragédie qui touche les familles, les communautés et des pays entiers et qui a des effets durables sur ceux qui restent. Le suicide intervient à n’importe quel moment de la vie et était la quatrième cause de mortalité chez les 15-29 ans dans le monde en 2019.

Le suicide n’est pas le seul fait des pays à revenu élevé, c’est un phénomène mondial. En fait, plus de 77 % des suicides sont survenus dans des pays à revenu faible ou intermédiaire en 2019.

Le suicide est un grave problème de santé publique ; or il peut être évité moyennant des interventions menées en temps opportun, fondées sur des données factuelles et souvent peu coûteuses. Pour que l’action nationale soit efficace, une stratégie globale multisectorielle de prévention du suicide s’impose.

L’OMS considère le suicide comme une priorité de santé publique. Le premier rapport mondial de l’OMS sur le suicide intitulé Prévention du suicide : l’état d’urgence mondial, publié en 2014, vise à sensibiliser davantage à l’importance en santé publique du suicide et des tentatives de suicide, et à donner à la prévention du suicide un rang élevé parmi les priorités de l’action mondiale en santé publique. Il vise également à encourager et aider les pays à élaborer ou renforcer des stratégies complètes de prévention du suicide dans le cadre d’une approche multisectorielle de santé publique.

OMS-Suicide-urgence-mondiale_fre.pdf

 

Le suicide est l’un des problèmes de santé prioritaires du Programme d’action de l’OMS Combler les lacunes en santé mentale (mhGAP), lancé en 2008, qui fournit des orientations techniques fondées sur des données factuelles en vue de développer la prestation de services et les soins pour les troubles mentaux, neurologiques et liés aux substances psychoactives dans les pays. Dans le Plan d’action de l’OMS pour la santé mentale 2013-2020, les États Membres de l’OMS se sont engagés à s’efforcer d’atteindre la cible mondiale d’une réduction d’un tiers du taux de suicide dans les pays d’ici à 2030.

De plus, le taux de mortalité par suicide est un indicateur de la cible 3.4 des objectifs de développement durable : d’ici à 2030, réduire d’un tiers, par la prévention et le traitement, le taux de mortalité prématurée due à des maladies non transmissibles et promouvoir la santé mentale et le bien-être.

OMS-suicide_plan-daction-fre.pdf

 

 

Conduites suicidaires à l’échelle des régions (2019)

Suicide et tentative de suicides : données nationales et régionales

Santé publique France publie dans un numéro thématique du bulletin épidémiologique hebdomadaire les dernières données épidémiologiques sur le suicide et les tentatives de suicide ainsi que pour la première fois des bilans régionaux sur les conduites et pensées suicidaires.

L’objectif de ce numéro du BEH est de faire le point des données sur les conduites suicidaires en France à partir d’enquêtes et de bases médico-administratives qui  permettent d’étudier la mortalité, la morbidité et les causes associées à l’acte suicidaire. Ces connaissances sont indispensables pour renforcer les stratégies de prévention du suicide. Y est également abordée la question de l’évaluation des associations de prévention et d’aide à distance en santé dans le domaine de la prévention du suicide.

Près de 5% de la population adulte déclare avoir pensé à se suicider au cours de l’année

Le Baromètre de Santé publique France 2017 apporte des connaissances sur les idées suicidaires et les tentatives de suicide (TS) dans la population générale et chez les actifs. Près de 5% des 18-75 ans de la population générale déclaraient avoir pensé à se suicider au cours des 12 derniers mois et plus de 7% déclaraient avoir fait une TS au cours de la vie. Les femmes étaient plus touchées que les hommes. Plusieurs facteurs associés aux comportements suicidaires y sont identifiés : avoir eu un épisode dépressif, avoir à faire face à des situations financières difficiles, le fait d’être célibataire, divorcé ou veuf, l’inactivité professionnelle, l’exposition aux violences ainsi que les évènements traumatisants dans l’enfance.

Des secteurs d’activité professionnelle plus à risque

Ce même baromètre montre que chez les actifs 4,5% des femmes et 3,1% des hommes ont eu des pensées suicidaires et qu’un tiers les attribuait à des raisons professionnelles. Les secteurs d’activité les plus touchés étaient ceux de l’hébergement et restauration, des arts et spectacles et de l’enseignement.

Une situation préoccupante concernant les tentatives de suicide et pensées suicidaires chez les jeunes filles

Les adolescents de 17 ans ont été interrogés dans le cadre de  de l’enquête Escapad (Enquête sur la santé et les consommations lors de l’appel de préparation à la défense) de l’OFDT. Il en ressort qu’en 2017, près de 3% des adolescents déclaraient avoir fait au cours de leur vie une TS ayant nécessité une hospitalisation. La situation des filles est particulièrement préoccupante avec une augmentation des TS et pensées suicidaires depuis 2011. Là aussi la dépression est la variable la plus fortement associée. D’autres variables sont également associées aux conduites suicidaires, telles que le décrochage scolaire et les consommations de substances psychoactives (alcool, tabac et drogues illicites).

L’analyse des hospitalisations pour TS par SpFrance confirme la situation préoccupante des jeunes filles âgées de 15 à 19 ans. C’est dans cette population que le taux le plus élevé est systématiquement observé quelle que soit l’année. Par ailleurs, sur l’ensemble de la population, le nombre d’hospitalisations pour TS a diminué entre 2008 et 2017, passant de plus de 100 000 par an à environ 89 000 en 2017, cette baisse étant plus marquée chez les femmes. Par contre, le taux annuel de récidives de TS hospitalisées est resté constant. Certaines régions (Bretagne, Normandie et Hauts-de-France) sont plus touchées que d’autres et cette différence présente en 2008 perdure en 2017 (voir encadré). La majorité de cas de TS présente une pathologie psychiatrique sous-jacente, en particulier une dépression.

L’importance des troubles mentaux sous-jacents

Les troubles psychiatriques, en particulier la dépression et les troubles anxieux, étaient surreprésentés dans les 156 910 certificats de décès mentionnant le suicide comme cause de décès entre 2000 et 2014, comparés aux autres certificats de décès. Le suicide, contrairement aux TS, concerne une forte majorité d’hommes. Si quelques pathologies non mentales ont pu être repérées sur ces certificats, il n’a pas été possible d’identifier leur lien avec le suicide. Les bases médico-administratives du système national des données de santé (SNDS) pourraient apporter un éclairage complémentaire.

Identifier les personnes à risque pour cibler les actions de prévention

Identifier les personnes vulnérables et à haut risque en permettant d’intervenir en amont de la crise suicidaire est l’une des clés de la réussite d’une politique de prévention du suicide, comme le repérage et la prise en charge de la dépression, le maintien du lien avec les personnes ayant fait une TS. En milieu professionnel, l’identification des secteurs d’activités plus à risque permettra de cibler la prévention. Chez les jeunes, les usages de substances psychoactives, le décrochage scolaire et les symptômes dépressifs pourraient être utilisés comme des indicateurs  pour le repérage de profils d’adolescents présentant un risque accru de conduites suicidaires.

Encadré – Conduites suicidaires à l’échelle des régions

Pour la première fois, Santé publique France publie des bilans régionaux sur les conduites suicidaires à partir de trois sources de données (décès, hospitalisations, passages aux urgences pour tentative de suicide) et sur les pensées suicidaires à partir du baromètre de Santé publique France 2017. Si on considère l’ensemble des données, la région Hauts-de-France a la situation la plus défavorable. A l’opposé, l’Ile-de-France a la situation la plus favorable. Les différences inter-départementales sont encore plus marquées.

Épidémiologie du suicide dans le monde (OMS)

En 2019, on estime que 703 000 personnes sont mortes par suicide.Le taux de suicide mondial normalisé selon l’âge était de 9,0 pour 100 000 habitants pour 2019. Les taux variaient selon les pays, allant de moins de deux décès par suicide pour 100 000 à plus de 80 pour 100 000

 

Le taux mondial de suicide standardisé pour l’âge était plus élevé chez les hommes (12,6 pour 100 000) que chez les femmes (5,4 pour 100 000). Alors que pour les femmes, les taux les plus élevés dans les pays étaient supérieurs à 10 pour 100 000, pour les hommes, ils étaient supérieurs à 45 pour 100 000.
À l’échelle mondiale, le taux de suicide standardisé pour l’âge était 2,3 fois plus élevé chez les hommes que chez les femmes. Les ratios de suicide homme/femme (M/F) supérieurs à 1 indiquent que les taux de suicide sont plus élevés chez les hommes que chez les femmes. Alors que le ratio était légèrement supérieur à 3 dans les pays à revenu élevé, il était plus faible dans les pays à revenu faible et intermédiaire (pays à faible revenu : 2,9 ; pays à revenu intermédiaire inférieur : 1,8 ; pays à revenu moyen supérieur : 2,6)

À l’échelle mondiale, la majorité des décès par suicide sont survenus dans des pays à revenu faible ou intermédiaire (77 %), où vit la majeure partie de la population mondiale (figure 5). Plus de la moitié des suicides dans le monde (58%) ont eu lieu avant l’âge de 50 ans. La plupart des adolescents décédés par suicide (88%) étaient originaires de pays à revenu faible ou intermédiaire, où vivent près de 90% des adolescents du monde.

Le suicide était la quatrième cause de décès chez les jeunes de 15 à 29 ans pour les deux sexes, après les accidents de la route, la tuberculose et la violence interpersonnelle (figure 6). Chez les femmes et les hommes, le suicide était respectivement la troisième et la quatrième cause de décès dans ce groupe d’âge.

Le suicide était la quatrième cause de décès chez les 15-19 ans pour les deux sexes, le nombre de décès étant relativement similaire chez les femmes et les hommes dans ce groupe d’âge (figure 7). Le suicide était la troisième cause de décès chez les filles de 15-19 ans (après les conditions maternelles) et la quatrième cause de décès chez les hommes (après la tuberculose) dans ce groupe d’âge.

Épidémiologie régionale du suicide
Des différences dans les taux de suicide standardisés pour l’âge peuvent être observées dans les régions de l’OMS. Les taux de suicide dans les régions d’Afrique (11,2 pour 100 000), d’Europe (10,5 pour 100 000) et d’Asie du Sud-Est (10,2 pour 100 000) étaient supérieurs à la moyenne mondiale (9,0 pour 100 000) en 2019. Le taux de suicide le plus bas a été enregistré dans la région de la Méditerranée orientale (6,4 pour 100 000). La région de l’Asie du Sud-Est présentait un taux de suicide standardisé pour l’âge beaucoup plus élevé chez les femmes (8,1 pour 100 000) par rapport à la moyenne mondiale des femmes (5,4 pour 100 000). Chez les hommes, les régions de l’Afrique (18,0 pour 100 000), des Amériques (14,2 pour 100 000) et de l’Europe (17,1 pour 100 000) présentaient toutes des taux de suicide supérieurs à la moyenne mondiale des hommes (12,6 pour 100 000).
Alors que la plupart des suicides dans le monde ont eu lieu dans des pays à revenu faible ou intermédiaire (77%), les pays à revenu élevé ont le taux de suicide standardisé pour l’âge le plus élevé (10,9 pour 100 000). Les pays à revenu moyen inférieur ont un taux légèrement inférieur (10,1 pour 100 000), et les pays à faible revenu et à revenu moyen supérieur ont des taux plus faibles (9,9 pour 100 000 et 7,3 pour 100 000 respectivement). Les femmes des pays à revenu moyen inférieur avaient le taux de suicide le plus élevé (7,1 pour 100 000) par rapport aux femmes des autres groupes de niveaux de revenus. Les hommes des pays à revenu élevé présentaient le taux le plus élevé (16,5 pour 100 000) par rapport aux hommes des autres groupes de revenus.

Évolution des taux de suicide dans le temps
Au cours des 20 années entre 2000 et 2019, le taux de suicide mondial normalisé selon l’âge a diminué de 36 %, avec des baisses allant de 17 % dans la Région de la Méditerranée orientale à 47 % dans la Région européenne et 49 % dans la Région du Pacifique occidental. La seule augmentation des taux de suicide normalisés selon l’âge a été enregistrée dans la Région des Amériques, où elle a atteint 17 % au cours de la même période. Le taux mondial a également diminué pour les taux spécifiques aux groupes d’âge.

 

 

Source: https://www.infosuicide.org/reperes/epidemiologie/epidemiologie-dans-le-monde/

Épidémiologie France Suicides

Données épidémiologiques des suicides en France

En 2017, 8355 décès par suicide ont été enregistrés en France Entière  et 8214 en France métropolitaine.

Les statistiques de décès par suicide sont issues des certificats de décès dont la base de données est gérée par le CépiDc-Inserm.
Toutefois, une sous-évaluation est estimée à 10 % pour les données nationales, due en particulier aux décès dont la cause reste indéterminée ou à ceux ayant fait l’objet d’un examen médico-légal dont la conclusion n’a pas été rapportée au CépiDc-Inserm.
En savoir plus:

Les taux de suicides sont trois fois supérieur chez les hommes.

Les classes d’âge les plus touchées :

  • les 45-54 ans,
  • les 55-64 ans
  • les 35-44 ans

Le taux de décès par suicide augmente fortement avec l’âge chez les hommes et est le plus élevé après 74 ans.

Cependant, la part du suicide dans la mortalité générale est nettement plus élevée chez les jeunes des deux sexes que chez les personnes âgées : Le suicide est la 1ère cause de mortalité des 25-34 ans (20 % environ du total des décès dans cette tranche d’âge) et la 2ème cause (après les accidents de la circulation) chez les 15-24 ans.

source INSERM – CépiDC (effectifs de décès de personnes domiciliés en France (France entière) & Taux brut de décès par suicide (France entière))



s
ource INSERM – CépiDC (effectifs de décès de personnes domiciliés en France Métropolitaine & Taux brut de décès par suicide (France métropolitaine))

D’après donnéesINSERM – CépiDC (effectifs de décès de personnes domiciliés en France Métropolitaine)

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2017
France entièresource INSERM – CépiDC

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En 2016, comme les années précédentes, le mode de suicide le plus fréquent est la pendaison (58% des suicides), loin devant les armes à feu (13%), les prises de médicaments et autres substances (10 %) et les sauts d’un lieu élevé (8 %). Ces modes de décès diffèrent sensiblement selon le sexe. Pour les hommes, la pendai-son est à l’origine de 62 % des suicides et les armes de 16 %. Pour les femmes, la pendaison (44 %) et la prise de médicaments et autres substances (21 %) sont les modes les plus utilisés. (Source ONS 2020)

En ce qui concerne le suicide, de nombreuses études démontrent également l’importance des facteurs psychiatriques. Selon les recherches en suicidologie, de 50 à 90% des personnes qui se sont suicidées souffraient d’un ou de problèmes de santé mentale (dépression, troubles bi-polaires, anxiétés, addictions, schizophrénie, anorexie…)
Il est estimé qu’avoir fait une tentative de suicide multiplie par 30 le risque suicidaire. Un trouble bipolaire le multiplie par 28, la dépendance à l’alcool par 22, la dépression par 20, la schizophrénie par 8 et un trouble de la personnalité par 3. Ces facteurs s’additionnant. Toutefois il s’agit de statistiques, et des personnes souffrant d’un ou de troubles psychiques peuvent très bien ne jamais tenter de se suicider.
Il n’existe pas un risque mais bien plusieurs étroitement associés, s’inscrivant à la fois dans une histoire personnelle, un contexte familial et environnement social. Le suicide est donc un phénomène multifactoriel, complexe, impliquant des facteurs autant psychologiques, sociaux et biologiques, que culturels et environnementaux.

L’évolution du taux de suicide sur une longue période

La période 1953-2012 peut être globalement découpée en trois phases : une stabilité du taux de suicide pour les années 1953-1976 (1,55/10000), une augmentation régulière entre 1977 et 1985 (2,26/10000) et une décroissance ensuite (1,53/10000 en 2012)

Globalement, le taux de décès par suicide a tendance à diminuer : -33,5 % entre 2000 et 2016. Cette baisse est plus importante au cours de la période 2008-2016 (-23,5 %) qu’entre 2000 et 2008 (-13,0 %). Les taux diminuent pour toutes les classes d’âge à l’exception des 45-54 ans entre 2000 et 2008 et des 95 ans ou plus au cours de la période 2008-2016.

Taux de décès par suicide par région

Les taux de décès par suicide par région doivent être comparés avec prudence. En effet, les données relatives au nombre de décès par suicide présentent un défaut d’exhaustivité global estimé à 10 % en France métropolitaine par le CépiDc-Inserm. Cette sous-estimation varie selon les régions et atteint 46 % en Île-de-France. Ainsi les différences de taux de suicide sont vraisemblablement en partie imputables à la qualité de la remontée de l’information et ne reflètent pas la situation épidémiologique réelle (voir le 2e rapport de l’ONS, p.185). Les taux standardisés moyens de décès par suicide entre 2014 et 2016 varient fortement selon les régions (tableau 3). Le taux de la Bretagne dépasse de 52,0 % le taux moyen de la France métropolitaine. Viennent ensuite les régions Pays de la Loire, Normandie et Hauts-de-France, avec des taux supérieurs de plus de 30 % au taux moyen de France métropolitaine. Les régions Auvergne-Rhône-Alpes, Corse, et Île-de-France enregistrent les plus bas taux de décès par suicide (inférieurs de plus de 14 % au taux moyen de France métropolitaine). Entre 2000-2002 (période de référence) et 2014-2016, les taux de décès par suicide ont tendance à diminuer de façon significative quelle que soit la région considérée.

(Source ONS 2020)

Article à retrouver sur infosuicide.org

FEDERAL PROBATION JOURNAL (Vol 85, n°3, decembre 2021) Faciliter la conversation pour les agents de probation : Utiliser l’entretien motivationnel pour discuter des idéations suicidaires et tentatives de suicide des clients


A propos des auteurs:

Geoff Twitchell est un psychologue clinicien agréé (California Board of Psychology 2000) qui a suivi une formation avancée en matière de toxicomanie et de traitement des troubles concomitants. Sa carrière dans le domaine de la toxicomanie a débuté il y a plus de 20 ans, lorsqu’il a travaillé avec le Dr Marc Schuckit (étude longitudinale de l’UCSD sur les facteurs de risque de l’alcoolisme). Le Dr Twitchell a ensuite publié ses travaux de doctorat de l’Université de l’État du Michigan sur les fondements biologiques de l’alcoolisme et la dysrégulation comportementale et affective qui y est associée.

En septembre 2013, le Dr Twitchell a pris ses fonctions de directeur des traitements pour le département de probation du comté de San Diego. À ce nouveau poste, il est chargé d’identifier, de mettre en œuvre et d’évaluer des traitements fondés sur des données probantes pour les adultes et les jeunes. Le Dr Twitchell assure la liaison clinique avec les tribunaux supérieurs pour mineurs et adultes, les prestataires de traitements communautaires, les services de santé comportementale, le département du shérif, le bureau du procureur et le bureau du défenseur public. Il copréside le comité de traitement des délinquants du comté, où son éducation et sa formation en matière d’évaluation clinique ont contribué à l’obtention de données valables et fiables sur la santé mentale, le risque de délinquance et la consommation de substances psychoactives, afin d’aider le processus judiciaire.

Melinda (Mindy) Hohman, Ph.D., MSW, est professeur et directrice de l’école de travail social de l’université d’État de San Diego. Elle donne des cours sur le traitement de la toxicomanie, la recherche, l’entretien motivationnel et la pratique du travail social. Elle a publié de nombreux articles sur l’entretien motivationnel, l’évaluation de la toxicomanie et les services de traitement, ainsi que sur les questions relatives aux femmes dans ce domaine. Elle est formatrice en entretien motivationnel (EM) depuis 1999, formant des travailleurs sociaux communautaires, des agents de protection de l’enfance, des agents de probation et des conseillers en toxicomanie dans le sud de la Californie et dans d’autres États. Elle est l’auteur du livre Motivational Interviewing in Social Work Practice. Le Dr Hohman donne chaque année un cours d’étude à l’étranger sur l’abus de substances et la réduction des risques, à Dublin, en Irlande.

Extrait: 

ENVIRON 4 357 000 ADULTES sont placés sous surveillance communautaire (milieu ouvert) aux États-Unis, la majorité d’entre eux (3 492 900) relevant des systèmes de probation des comtés (Oudekerk & Kaeble, 2021). Des études menées aux États-Unis et dans d’autres pays ont montré que les adultes en probation présentent un risque d’idées suicidaires, de tentatives ou de décès par suicide, selon le résultat étudié, trois à huit fois supérieur à celui de la population générale (Clark et al., 2013 ; Gunter et al., 2011 ; Sirdifield, Brooker, & Marples, 2020 ; Yu & Sung, 2015). Par exemple, Philips et ses collègues (2015) ont constaté un taux annuel de décès par suicide de 118 pour 100 000 chez les personnes sous surveillance communautaire, contre 13,6 pour 100 000 dans la population générale, âgée de 30 à 49 ans, et le taux était encore plus élevé chez les femmes sous surveillance de probation, à 146 pour 100 000 dans la même catégorie d’âge.

Les efforts actuels de réforme de la justice pénale confèrent aux agents de probation et de libération conditionnelle des responsabilités accrues. Ces réformes mettent notamment l’accent sur une alliance de travail avec les clients et sur l’utilisation de pratiques fondées sur des données probantes pour remplacer les stratégies plus traditionnelles utilisées en détention (Bogue, 2020 ; Bonta & Andrews, 2017 ; Clark, 2021 ; Gunter et al., 2011). Les agents de probation sont en mesure d’identifier les clients susceptibles de présenter un risque de suicide et de les orienter de manière appropriée, si nécessaire, à la fois dans le cadre du processus d’évaluation et au-delà, lors de la supervision de routine (Borrill, Cook et Beck, 2017 ; Mackenzie et al., 2018). Cependant, la discussion sur le suicide est souvent inconfortable tant pour les clients que pour les agents de probation. Les clients eux-mêmes peuvent être réticents à divulguer leurs pensées ou comportements suicidaires en raison de la stigmatisation, de la possibilité d’une réaction de soutien ou d’un traitement non désiré (Hom, Stanley, Podlogar, & Joiner, 2017 ; Mayer et al., 2020 ; Sheehan et al., 2019). Comme d’autres professionnels de l’aide, les agents de probation peuvent éviter de parler du suicide par crainte d’augmenter la probabilité qu’un suicide se produise, par anxiété quant à la façon de gérer une situation où un client révèle des idées ou des tentatives de suicide, par sentiment d’agir en dehors de leur champ d’expertise ou par manque de compétences pour savoir comment guider la discussion (Freedenthal, 2018 ; McCabe, Sterno, Priebe, Barnes, & Byng, 2017). Cet article explore les idées de suicide et les tentatives de suicide chez les clients des services de probation et de libération conditionnelle et discute des avantages potentiels de l’utilisation de l’entretien motivationnel (EM) comme méthode de communication pour fournir un cadre permettant d’aider les agents de probation à dépasser l’évitement du sujet, en particulier s’il émerge lors des visites de routine. Nous sommes conscients qu’il n’est pas du ressort des agents de probation de traiter les clients qui sont aux prises avec ces problèmes. Cependant, étant donné le taux élevé de comportements et d’idées suicidaires chez les clients, l’agent de probation peut, peut-être, être la première personne à reconnaître qu’une personne envisage de se suicider et à intervenir de manière à ce que cette personne soit orientée vers le prestataire de soins approprié. Pour illustrer la façon dont l’EM peut s’intégrer dans ce processus, nous présentons un exemple de vignette clinique et de dialogue.

(…)

Discussion

Le taux de tentatives de suicide et de décès est plus élevé dans la population pénale que dans la population générale (Yu & Sung, 2015). L’EM a déjà été introduit dans le travail de probation (Stinson & Clark, 2017) et fournit une méthode de communication lorsque les clients ont des pensées suicidaires ou ont tenté de se suicider. L’objectif d’une conversation EM entre un agent de probation et son client est de motiver le client à demander de l’aide, car la plupart des clients éprouvent une ambivalence entre le désir de vivre et le désir de mourir (Britton, 2015). La discussion sur les pensées suicidaires et/ou les tentatives de suicide est intimidante et délicate, mais ces conversations peuvent être extrêmement influentes pour orienter les clients dans une direction positive (Dazzi et al., 2014). Le personnel de probation peut s’inquiéter de la responsabilité (Viglione, 2019) ou croire qu’engager une telle conversation dépasse son champ de pratique. L’utilisation de l’EM par les CPIP peut également être inconfortable, en particulier pour ceux qui sont habitués à des méthodes de communication plus directives (Viglione, Rudes, & Taxman, 2017). Le modèle présenté fournit toutefois un guide pour l’utilisation de l’EM dans ces conversations difficiles. Même s’il ne rend pas toujours ces discussions  » plus faciles « , il fournit un cadre pour insuffler de l’espoir ainsi que des options pour accéder à une aide plus professionnelle, ouvrant ainsi une nouvelle voie pour le personnel. Les CPIP doivent également connaître les ressources communautaires en matière de santé mentale. Le regroupement ou l’inclusion de professionnels de la santé mentale dans l’équipe de routine favorise une approche interprofessionnelle plus complète pour répondre aux besoins complexes de l’importante population placée sous surveillance communautaire.

Les CPIP peuvent être particulièrement attentifs à la mise en place et au maintien d’une structure pour leur travail avec les clients, ainsi qu’à l’approche de ces derniers dans l’esprit de l’EM. Cela permet de développer une relation de confiance ainsi qu’un sentiment de prévisibilité et de sécurité pour le client (Clark, 2021). Le maintien d’heures régulières de rendez-vous, d’un lieu de travail, de prestataires référencés et d’un CPIP assigné, dans la mesure du possible, crée également un sentiment de contrôle sur sa vie et un sentiment de connexion (Borrill, Cook, & Beck, 2017). Les rendez-vous manqués sur un lieu de travail, avec un prestataire de santé mentale ou lors d’un rendez-vous avec le CPIP peuvent être le signe d’une détresse émotionnelle et nécessiter un suivi. Le risque est toujours possible même si le client nie avoir des idées de suicide ou s’y préparer, en particulier dans le contexte de facteurs de stress psychosociaux (Nagdimon et al., 2021). Ces facteurs de stress peuvent être traités par une aide au logement, à l’emploi, aux questions financières, etc. (Yu et al., 2014).

La formation interprofessionnelle entre les prestataires de probation et de santé mentale pourrait inclure l’EM pour aider à améliorer les compétences d’engagement des CPIP lorsqu’ils cherchent à développer un changement de comportement avec les probationnaires et les libérés conditionnels. Elle peut aussi fournir simultanément le soutien nécessaire aux agents de probation pour répondre aux besoins de santé mentale, y compris les idées suicidaires et le risque de tentative de suicide, ce qui maximise la sécurité et la réussite de la réinsertion des probationnaires et des libérés conditionnels (Twitchell, Hohman, & Gaston, 2021). La formation doit également porter sur les attitudes personnelles des professionnels à l’égard des idées et des tentatives de suicide. La stigmatisation et la honte qui entourent le suicide sont répandues dans notre culture et étouffent souvent les voix de ceux qui ont besoin d’en parler (Mayer et al., 2020).

Article complet (FR): Faciliter la conversation pour les agents de probation _ Utiliser l’entretien motivationnel pour discuter des idéations suicidaires et tentatives de suicide des clients

Article original (ENG): https://www.uscourts.gov/sites/default/files/85_3_6_0.pdf

 

US (2020) Comprendre les conséquences du suicide des agents pénitentiaires

Cet article traite du suicide des agents pénitentiaires et examine le taux élevé de suicides chez les agents pénitentiaires travaillant pour le Massachusetts Department of Correction (MADOC) entre 2010 et 2015.

Entre 2010 et 2015, au moins 20 agents pénitentiaires travaillant pour le Massachusetts Department of Correction (MADOC) sont décédés par suicide. Le taux de suicide moyen des agents pénitentiaires du MADOC au cours de cette période était d’environ 105 pour 100 000 – un taux au moins sept fois supérieur au taux de suicide national (14 pour 100 000), et presque 12 fois supérieur au taux de suicide pour l’État du Massachusetts (9 pour 100 000). Certains comtés du Massachusetts ont également signalé la perte de plusieurs agents pour cause de suicide au cours de la même période, ce qui laisse penser que le phénomène observé dans les prisons de l’État se répercute dans les établissements correctionnels des comtés. Même dans le contexte de l’augmentation des taux de suicide dans tout le pays, et compte tenu du risque élevé de suicide dans les services de protection, le nombre de suicides parmi les agents pénitentiaires du Massachusetts est déconcertant.

Notre équipe de recherche de la Northeastern University a d’abord appris l’existence d’un nombre croissant de suicides lors d’entretiens avec des officiers et des sergents qui participaient à une étude sur le stress professionnel. Au cours de ces entretiens, un certain nombre d’officiers ont fait part de leur inquiétude concernant les récents suicides de leurs collègues, et plusieurs d’entre eux ont indiqué qu’ils ne participaient à l’étude sur le stress que parce qu’ils étaient préoccupés par ces suicides. Nous avons dû interrompre temporairement les entretiens dans l’un des établissements pénitentiaires lorsque nous avons appris qu’un autre agent qui y travaillait venait de se suicider. À peu près à la même époque, un programme d’information local de la chaîne Fox a diffusé plusieurs reportages sur l’augmentation du nombre de suicides d’agents au MADOC, en mettant en scène certaines des familles des agents décédés.

Prévention du suicide

En tant que chercheurs universitaires travaillant déjà avec un service correctionnel de l’État motivé pour s’attaquer aux suicides qu’ils considéraient eux aussi comme un problème croissant, nous avons demandé au MADOC de nous fournir davantage d’informations. Nous pensions pouvoir déceler un modèle identifiable dans les données fournies. Nous avons été surpris de constater qu’il n’y avait rien d’évident. Les agents décédés entre 2010 et 2015 comprenaient des hommes et des femmes, à peu près proportionnellement à leur représentation dans la force de travail (qui est dominée par les hommes). Ils étaient âgés de 23 à 62 ans et avaient fait des carrières dans des établissements pénitentiaires allant de six mois à 32 ans. Moins de la moitié d’entre elles avaient un passé militaire. Parmi les personnes décédées par suicide, on trouve des officiers, des sergents, des lieutenants et des capitaines. Plusieurs d’entre eux avaient occupé le poste de directeur adjoint ou un poste plus élevé. La plupart des 16 prisons de l’État ont connu au moins un suicide d’officier, une poignée d’entre elles ayant connu plusieurs suicides. Certaines années, il y a eu quatre ou cinq suicides. Les seules caractéristiques extérieures évidentes que ces agents avaient en commun étaient qu’ils travaillaient tous à l’époque, ou avaient travaillé, pour le MADOC, et qu’ils étaient tous morts par suicide.

En 2016, mon collègue Carlos Monteiro et moi-même avons reçu une subvention fédérale du National Institute of Justice pour travailler avec le MADOC à la réalisation d’une vaste étude de méthodes mixtes sur le suicide dans les établissements pénitentiaires. Nous avons défini cinq objectifs principaux pour ce travail :

  • Développer une compréhension nuancée du contexte dans lequel le suicide des agents s’est produit ;
  • Évaluer de manière exhaustive les nombreux impacts du suicide des agents correctionnels sur les familles, les amis et les collègues ;
  • Mieux comprendre l’impact des suicides d’agents sur l’environnement institutionnel ;
  • Identifier les corrélats (et les facteurs de risque) de l’anxiété, de la dépression, du stress post-traumatique et des idées suicidaires ;
  • et Comprendre comment la structure, la fonction et la composition des réseaux sociaux des agents peuvent être liées aux idées suicidaires, ainsi qu’aux indicateurs de bien-être.

Stigmatisation et impact

En tant que personne ayant perdu un membre de sa famille immédiate par suicide, et sachant qu’il est impossible de se remettre complètement de la perte d’un être cher par suicide, il était extrêmement important pour moi personnellement que nous représentions les officiers décédés par suicide comme étant plus que de simples statistiques dans une étude de recherche financée par le gouvernement fédéral. Les policiers décédés étaient des individus dont les familles et les amis les aimaient et qui auraient fait tout ce qui était nécessaire pour empêcher le suicide, s’ils l’avaient pu. Compte tenu de la stigmatisation encore associée au suicide, nous avons estimé qu’il était particulièrement important de décrire la vie des officiers de la manière la plus complète possible, afin de décrire la manière dont ils avaient vécu, plutôt que de se concentrer exclusivement sur la manière dont ils étaient morts.

Nous avons également reconnu que, pour ceux qui restent, la perte d’un suicide est différente de tout autre type de décès, et qu’il est extrêmement difficile de décrire les impacts à quelqu’un qui n’est pas passé par là. Néanmoins, nous avons voulu essayer de transmettre les histoires de ces officiers avec une authenticité qui ne peut être relayée que par les mots de ceux qui ont connu la personne décédée le plus intimement.

Afin de donner à ceux qui connaissaient le mieux ces officiers la possibilité de raconter l’histoire de leur proche, nous avons entrepris de trouver et d’interroger les membres de la famille et les amis proches des 20 officiers décédés par suicide au cours de la période que nous avons étudiée. Nous avons utilisé les notices nécrologiques des officiers, accessibles au public, et avons essayé de contacter chacune des personnes citées comme survivantes. Nous avons contacté les parents, les frères et sœurs, les conjoints, les enfants adultes et la famille élargie. Nous avons essayé de trouver des amis proches qui avaient présenté leurs condoléances sur des sites Internet accessibles au public. Le comité d’examen institutionnel de l’université de Northeastern, qui veille à la protection des sujets humains lors des expériences de recherche, a exigé que nous essayions de contacter chaque personne au maximum deux fois, par le biais d’une lettre postée à la dernière adresse connue de la personne, et que nous n’allions pas plus loin tant que nous n’avions pas reçu en retour une communication écrite exprimant un intérêt affirmatif pour un entretien avec l’équipe de recherche.

Compte tenu de ces restrictions, nous craignions que peu de personnes nous répondent et que la portée de nos études de cas se limite à l’examen des dossiers du personnel et d’autres documents fournis par le ministère.

En fait, la réponse à notre démarche auprès des familles a été extraordinaire. En octobre 2019, nous avions reçu des nouvelles des familles et des amis de 17 des 20 officiers. Nous leur sommes profondément reconnaissants d’avoir accepté de nous parler, car même si nos études de cas ne se limitent pas à des entretiens avec la famille et les amis, nous avons estimé que nous ne pourrions rendre pleinement justice à la vie de ces agents que si nous en apprenions également sur eux de la part de leur famille immédiate et de leurs amis. Nous avons compris que, pour certaines familles, la participation était tout simplement trop difficile et l’expérience encore trop douloureuse pour être racontée. Nous les remercions également pour leur correspondance.

Tous nos entretiens ont été menés en personne, souvent au domicile des membres de la famille de l’officier, et nous avons commencé chaque entretien en demandant un souvenir favori de l’officier. Cela a permis aux familles de partager d’abord les expériences positives qu’elles avaient eues avec leur proche. Bien qu’elles n’aient pas été invitées à le faire, la plupart des familles ont apporté des photos, plusieurs nous ont envoyé ou montré des vidéos, et certaines nous ont fait part de choses que leur proche avait écrites. Toutes les familles nous ont donné de riches descriptions de la vie des officiers. L’amour que ces familles et amis portaient aux officiers était tout à fait évident, et la profondeur de leur perte était palpable. Nous avons été touchés par leur volonté de partager les bons souvenirs et de parler à des étrangers de ce qui a souvent été l’événement le plus dévastateur de leur vie. Nous avons quitté les entretiens avec le sentiment d’avoir appris à connaître personnellement ces officiers, même si ce n’est que brièvement. Bien que je n’aie jamais eu l’occasion de rencontrer l’un d’entre eux, je peux évoquer leur image à la vue de leur nom.

Malheureusement, lorsque nous avons interrogé des agents travaillant actuellement pour le département dans le cadre de la deuxième phase de la recherche, nous avons appris que d’autres agents étaient morts par suicide au cours de la période 2010-2015, et nous continuons donc à travailler sur ces études de cas. Bien que nous ne puissions encore rien affirmer de définitif, nous pouvons dire avec un degré de confiance relativement élevé qu’il y avait au moins trois types de cas distincts, et nous pouvons partager certains thèmes préliminaires émergents communs à ces trois types.

Pour être clair, le suicide a été choquant et dévastateur pour toutes les familles avec lesquelles nous avons passé du temps. Cependant, dans le cas de certains agents décédés par suicide, la famille a expliqué qu’il y avait eu des antécédents relativement longs d’anxiété, de dépression, ou les deux. Dans plusieurs cas, il y avait eu des tentatives de suicide antérieures – dans certains cas, les tentatives remontaient à l’adolescence. La famille savait que l’agent était en difficulté et ses membres faisaient tout ce qu’ils pouvaient pour intervenir. Même dans ces familles, l’événement suicidaire était imprévu et imprévisible.

Prévenir l’inattendu

Dans une série de cas apparentés, il n’y avait pas d’antécédents connus de problèmes de santé mentale, mais les policiers étaient connus pour être en proie à des difficultés personnelles particulièrement graves au moment de leur décès. Ces policiers avaient tendance à être perçus comme stables sur le plan émotionnel et comportemental jusqu’à ce qu’ils soient confrontés à un défi particulièrement important et récent dans leur vie. Bien que ces difficultés aient été dans certains cas clairement liées au travail, plusieurs policiers ayant fait l’objet de mesures disciplinaires ou de rétrogradations, elles étaient le plus souvent d’ordre personnel. Pour presque tous les policiers, les luttes personnelles et professionnelles étaient inextricables.

Plusieurs d’entre eux étaient au milieu de divorces difficiles et de litiges concernant la garde des enfants. Un certain nombre d’entre eux étaient aux prises avec des problèmes croissants de toxicomanie. Certains luttaient contre des douleurs chroniques dues à des blessures, souvent subies au travail. Plusieurs se battaient avec le service pour faire reconnaître les effets persistants de ces blessures professionnelles. Dans ces cas, qui sont à peu près égaux au nombre d’agents ayant des antécédents connus en matière de santé mentale, il y a eu des événements déclencheurs clairs. Ces agents étaient confrontés à une crise existentielle permanente et leurs familles étaient préoccupées, mais généralement pas par le risque de suicide. Souvent, il s’agissait d’officiers qui avaient récemment pris leur retraite ou qui espéraient le faire bientôt.

Enfin, il y a eu une poignée de cas où il n’y avait littéralement aucun signe de lutte préexistante que la famille ou les amis aient pu identifier. Pour la famille, ces suicides semblaient sortir de nulle part et avoir été déclenchés par un seul événement. Nous décrivons ces suicides comme des suicides impulsifs – ces officiers semblent avoir simplement perdu le sens de la mesure à un moment donné, prenant une décision instantanée aux conséquences dévastatrices et durables. Dans ces cas, il y a eu un événement déclencheur, mais aucun des signes précurseurs. Ces agents étaient généralement parmi les plus jeunes, et leur mort est l’une des plus difficiles à comprendre.

Comme on peut déjà s’en douter, il est difficile de généraliser ces cas. Au fur et à mesure que nous avons appris à « connaître » ces agents grâce à notre méthodologie d’étude de cas approfondie, nous nous sommes rendu compte qu’il serait extrêmement difficile de les décrire en termes collectifs sans reconnaître plus de différences que de points communs. En utilisant ce que nous avons appris des familles et des amis pour écrire sur les officiers, très probablement dans un livre que nous prévoyons d’écrire au cours de l’année à venir, nous ferons de notre mieux pour respecter notre engagement de raconter les histoires de la vie des officiers et pas seulement de leur mort.

Recherche sur le bien-être au travail

En juin 2018, nous avons lancé la deuxième phase de cette recherche, qui comprend des entretiens individuels avec des officiers de tous grades qui travaillent actuellement au MADOC. L’entrevue est menée sur leur lieu de travail, pendant leur quart de travail, dans une salle privée avec l’un de nos intervieweurs. Nous avons mené ces entretiens intensifs avec un échantillon aléatoire de plus de 300 officiers dans toutes les installations du MADOC. Nous avons mené près de 100 entretiens supplémentaires avec des agents qui se sont portés volontaires pour nous parler, dont certains connaissaient au moins l’un des agents décédés. En octobre 2019, il ne nous restait plus qu’une poignée d’entretiens à réaliser.

Dans le cadre de ces entretiens, nous posons aux agents des questions sur leur propre santé et leur bien-être. Nous leur posons également des questions sur leurs expériences personnelles en matière de suicide, notamment pour savoir s’ils connaissaient (et dans quelle mesure) l’un des agents décédés par suicide. Nous leur administrons une série d’instruments validés pour évaluer les niveaux d’anxiété, de dépression, de stress post-traumatique et d’idées suicidaires qu’ils déclarent eux-mêmes. Nous leur posons des questions sur leurs habitudes de sommeil et leur consommation d’alcool, sur leur niveau de stress et sur l’importance des conflits dans leur vie professionnelle et familiale. Nous leur demandons ce qu’ils pensent que le département devrait faire pour lutter contre le suicide.

La partie la plus innovante de notre travail de deuxième phase est peut-être notre analyse égocentrique du réseau social – un outil utilisé pour comprendre la structure et la fonction des liens du réseau d’un individu. Nous commençons l’entretien par une série de questions sur les personnes que l’agent connaît, en qui il a confiance ou sur lesquelles il peut compter pour différents types de besoins. Nous posons ensuite des questions sur les personnes citées, notamment sur le degré de connaissance de chacune d’entre elles. Nous espérons que cet aspect de notre étude nous aidera à mieux comprendre la taille, la structure et la densité des réseaux sociaux des agents, ainsi que les fonctions de protection (ou d’isolement) que ces réseaux sociaux peuvent remplir. Nous craignons que les réseaux sociaux de certains policiers deviennent plus restreints et leurs mondes sociaux plus isolés à mesure qu’ils s’intègrent davantage dans le travail correctionnel. Nous sommes particulièrement préoccupés par les effets que le travail posté et certains quarts de travail peuvent avoir sur la vie personnelle et professionnelle des agents. Nous prévoyons que l’analyse des réseaux sociaux ne fera que gagner en importance lorsque nous commencerons à développer une étude longitudinale qui suivra le bien-être des agents au fil du temps (à partir de l’académie).

Promouvoir le bien-être mental

Alors que nous parcourons le pays pour décrire nos recherches et partager ce que nous apprenons, je suis frappée par le nombre de fois où je suis abordée par un agent ou un administrateur d’un service correctionnel d’un autre État qui souhaite partager le fait qu’ils ont eux aussi perdu récemment un nombre disproportionné (et souvent choquant) de collègues à cause d’un suicide. Ces trois dernières années, nous avons appris que ce que nous pensions être une anomalie ne l’était probablement pas du tout.

Nous commençons à peine à analyser les nombreuses données que nous avons recueillies au cours de ces trois dernières années. En 2020, nous espérons pouvoir partager les résultats de cette recherche avec les familles qui ont perdu un être cher, ainsi qu’avec la communauté pénitentiaire et les forces de l’ordre au sens large. Bien que nous soyons convaincus qu’il est presque impossible de prédire le suicide et qu’il est donc extrêmement difficile de le prévenir, nous espérons utiliser nos découvertes pour mieux comprendre certains des facteurs de risque d’anxiété, de dépression, de stress post-traumatique et d’idées suicidaires qui peuvent servir de précurseurs au suicide.

Comme les familles qui ont accepté de nous rencontrer pour partager quelques souvenirs et décrire l’impact dévastateur de la perte de leur mari, femme, fils, fille, père, frère, sœur, oncle ou meilleur ami, nous espérons que ce travail permettra un jour à la famille d’un autre officier de ne jamais avoir à connaître la douleur persistante du suicide.

Le suicide forcé en EUROPE

Le suicide forcé (SF) désigne l’acte ultime d’une victime de violences psychologiques graves et répétées au sein du couple qui ne trouve plus que ce moyen pour sortir de son enfer. Cette notion est mal connue en Europe.

Le  projet SF_Eur est porteur d’une ambition forte et innovante : faire reconnaître la notion de SF d’abord en France et en Belgique, puis au niveau UE avec ses conséquences en termes épidémiologiques, juridiques et politiques, ainsi qu’oeuvrer à la formation des professionnels concernés et à la prévention des SF. Ce sujet n’a jamais été abordé dans un projet REC.

le Document complet est à retrouver ici: http://psytel.eu/PSYTEL/psy-documents/Suicides_forces/2022-SF_Eur_Guide_FR3_221228_web.pdf

Si le lien est brisé: IPV EU_Mortality_IPV EU_Mortality Synthese_Fr_100623